Théorem est un univers fantastique contemporain développé autour d’un jeu de rôle, entièrement téléchargeable, et d’un roman, publié au rythme d’un chapitre toutes les deux semaines.

C’est presque sans bruit et sans le moindre panache que je pris ma première goulée d’air. Je la happais comme s’il s’agissait de la dernière et m’y accrochais comme le noyé résolut à survivre. Mes yeux s’habituèrent peu à peu à la lumière ambiante, elle se faisait plutôt rare et seuls quelques précieux rayons de lune me révélaient mon environnement immédiat. Je me trouvais dans un caveau, l’ironie de la chose ne manqua pas de me frapper. Je détaillais mon corps, il se révéla également plein de surprise. Mon bras gauche était garrotté, je fis rouler une seringue au sol en essayant de le lever. Elle se brisa par terre, libérant au passage quelques gouttes de son délicieux poison. De la main droite, je tentais de libérer mon membre captif. La coordination main/œil était encore approximatif et cela me prit plusieurs minutes. J’essayais de me mettre à l’aise dans ma nouvelle peau, me tortillant comme on le ferait pour s’approprier un pantalon moulant d’occasion. Mes mains s’aventurèrent sur cette nouvelle enveloppe, je souris à la rencontre de ma paire de seins, une petite poitrine en poire à vous donner faim. Je m’aventurais plus avant pour être sur de mon pronostique (je vérifiais toujours depuis une drôle d’aventure à Macao), ma main droite se glissa entre mes cuisses : j’étais bien une femme. Cela faisait longtemps, ça promettait d’être amusant. Je pris appui contre une paroi pour me relever, mes jambes étaient encore trop faibles pour me porter, je sortis donc de ma tombe en m’appuyant contre le mur. La porte émit un grincement sinistre lorsque je la poussais vers l’extérieur réveillant ainsi le cimetière endormi. Je titubais encore un peu, avançant d’un pas mal assuré. La drogue devait toujours agir sur le corps, ce qui expliquait ma difficulté à m’adapter. Par acquis de conscience, je flattais mes fesses. Il faudrait que je constate cela dans un miroir mais j’avais bien l’impression d’avoir un corps de rêves. Dommage que celui-ci fût gâché par une tenue gothique du plus mauvais goût. Si j’en jugeais à sa fin et ses choix vestimentaires, je dirais que l’ancienne moi n’avait guère de respect pour elle-même, je tacherais de lui rendre plus d’honneur qu’elle ne le fit.
Reprenons du début. Je venais de me réveiller dans un nouveau corps. Ce n’était pas nouveau, je vous rassure, ça surprend la première fois, mais on s’y fait les cent suivantes. Bref, je venais de mourir, c’est mon fardeau, certains jouent super bien de la guitare et d’autres, comme moi, évite de trépasser en se glissant dans les corps des personnes mourantes à proximité. Ce qui ne m’empêche toutefois pas de jouer super bien de la guitare. Tout cela ne va pas sans contrepartie, je vous rassure, la principale étant que le processus m’empêche de me souvenir des dernières vingt-quatre heures de mon précédent corps, sans parler du fait que je ne sais absolument rien du nouveau. Puisque je venais de quitter l’enveloppe d’un jeune homme dans la fleur de l’age, il était peu crédible que je sois mort de vieillesse ou de maladie, il restait donc l’accident bête (ne rigolez pas, c’est dingue comme on peut oublier de regarder en traversant lorsqu’on est immortel) ou l’assassinat pur et simple.


Sachant que j’avais été engagé, il y a trois jours par Edwin Vaillant, l’un de mes meilleurs amis, pour retrouver sa sœur disparue, il n‘était pas exclu que je me sois fâché entre-temps avec les mauvaises personnes. C’est une autre sorte de talent que je possède, le don d’énerver tout le monde (ce terrible fléau qu’est la jalousie). Le plus simple pour comprendre ce qui m’était arrivé restait de reprendre les événements du début, je quittais donc le cimetière pour me rendre chez Edwin. Comme à chaque fois je me demandais ce qu’il en était advenu de mon ancienne carcasse, c’est toujours avec un petit pincement au cœur que je m’en sépare. Il m’est même arrivé d’assister à l’enterrement de mes anciens moi. Des moments toujours touchants et souvent très embarrassant.
En chemin, je ne pu m’empêcher de me détailler dans une vitrine. J’étais plutôt jeune, probablement tout juste majeure et pourtant déjà très séduisante. Une jolie brune au petit nez mutin et au sourire triste. Je ne devrais pas m’ennuyer avec ce corps-là. Quant-on pense qu’elle allait mourir d’une overdose dans un caveau, cela aurait été un sacré gâchis.


Lorsque j’arrivais devant la porte de l’appartement d’Edwin, je compris tout de suite que rien ne serait simple dans cette histoire. La porte était fermée, mais je notais de suite les traces d’effractions. J’avais suffisamment longtemps vécu des biens du labeur d’autrui pour m’y connaître dans ce domaine. Je poussais le battant, celui-ci s’ouvrit sans difficulté comme je le pressentais. L’appartement était un véritable champ de guerre, tout y avait été mis à sac. Bien entendu, je n’y trouvais aucune trace de mon ami. Je ramassais une photo au sol, on y voyait Edwin arroser copieusement sa sœur avec un jet d’eau, il semblait tout deux heureux et insouciant. C’est avec cette photo que tout avait commencé, il y a trois jours. Edwin m’avait tendu ce même cadre en me parlant de sa soeur. Elle s’appelait Line, c’était une fille gentille et courageuse qui poursuivait avec assiduité des études d’anthropologies. Elle avait disparu depuis presque une semaine, n’avait laissé aucune information et était injoignable. C’était très inhabituel et Edwin s’inquiétait au plus haut point. Je pouvais difficilement lui refuser un service alors que je lui étais déjà plusieurs fois débiteur. L’enquête semblait banale, je ne doutais pas de la régler rapidement bien qu’elle sortit de mon cadre d’investigation...


Un petit tour dans l’appartement de Line m’avait confirmé que c’était bien la fille gentille et courageuse que m’avait décrite Edwin. Toutefois, je découvris également qu’elle avait une conception de l’hygiène juste un poil au-dessus de l’insalubre et des dessous suffisamment affriolant pour faire oublier ce défaut à n’importe quel homme. J’appris également qu’elle travaillait activement sur son mémoire: une étude d’un nouveau phénomène de société. Comme nombre d’analyste, Line avait noté que depuis quelque temps déjà, les chiffres des suicides avaient connu une augmentation considérable. Toutefois, là où on attribuait généralement ce phénomène à la crise, la jeune fille semblait convaincue qu’il y avait une raison plus spécifique. Elle n’avait pas ménagé ses efforts pour étayer sa théorie et son enquête l’avait poussée vers un nouveau trafic de drogue en plein essor : le Bug. Ses dernières notes étaient d’ailleurs un relevé de surveillance des activités du réseau de distribution, elle avait réussi à remonter plusieurs petits dealers jusqu'à leur fournisseur : un certain Sonatine. Je savais à qui m’adresser pour en apprendre plus : mon vieux pote Combo.


Mes rapports avec lui remontaient maintenant à plusieurs années, je lui avais sauvé la mise dans une affaire de possession particulièrement macabre que nous avons, encore aujourd’hui, du mal à évoquer. En plus de ses activités de chef de bande et de dealer de drogue, il s’avère être l’un des prêtres vaudous les plus réputés d’Europe (un savoir qu’il tient de sa « tata Janine » ce que je ne m’empêche de lui rappeler non sans ironie). Comme prévu, il put m’en apprendre plus sur le dénommé Sonatine : il le gardait déjà à l’œil depuis un moment. Il me mit sérieusement en garde contre lui, celui-ci sortait de nulle part, était entouré de mystères et écrasait la concurrence avec une facilité déconcertante. Combo avait lui-même souffert plusieurs événements étranges lorsqu’il avait commencé à enquêter sur lui. Certains de ses hommes avaient commencé à agir étrangement et à nuire aux affaires. Combo put également m’en apprendre plus sur le Bug, il s’agissait d’un cloporte gros comme le poing dont on devait sucer la chair. Si les clients hésitaient toujours dans un premier temps, au vu de l’aspect écoeurant du produit, ils ne se faisaient jamais prier la seconde. L’effet était fulgurant, un véritable shoot de désespoir. Le Bug fonctionnait presque à l’opposé de toutes les autres drogues, sa prise provoquait un désespoir si violent qu’il en rendait la vie de l’utilisateur meilleure selon le même principe qui rend la vie merveilleuse aux miraculés. Comme toute drogues, l’effet était bien entendu addictive, le drogué avait besoin de son shoot de désespoir de plus en plus régulièrement pour pouvoir apprécier sa vie de plus en plus triste. Au final, les cas les plus atteints perdaient tout bonnement toutes émotions et perdaient goût à la vie.
Si je n’en connaissais pas cette utilisation, j’avais déjà-vu ce cloporte. Il était apparu en France depuis peu et n’avait, pour ce que j’en savais, jamais fait signe de vie auparavant. Il m’apparut alors évident qu’il faudrait que je prenne cette affaire d’insecte plus au sérieux.


Voilà c’était à peu prés tout ce dont je me souvenais des événements ayant précédé mon réveil dans le caveau. Me connaissant je m’étais sûrement faufilé chez ce Sonatine pour trouver Line, la suite coulait de source : je m’étais fait attraper et Sonatine n’était pas un tendre.
Je reposais la photo sur un meuble, la piste était encore chaude, il fallait que je l’exploite. Je me concentrais donc et fit danser les énergies de la pièce. Autour de moi, des silhouettes prirent vie, mimant le théâtre des derniers événements pour mes yeux seuls. Deux hommes massifs avaient forcé la porte d’Edwin, il l’avait ensuite bousculé dans ce qui devait être un interrogatoire, puis ils l’avaient assommé avant de mettre l’appartement sans dessus dessous et de l’emmener. Les énergies se dissipèrent, elles n’avaient fait que confirmer ce que je savais déjà : Edwin avait été enlevé. Toutefois, je me demandais pour quelle raison, ils avaient pu interroger Edwin. Sa sœur n’était-elle qu’une monnaie d’échange pour autre chose ?


Cette partie de l’investigation vous paraît peut-être confuse ? Il est vrai que vous ignorez encore quelques détails sur ma personne. Voyez vous, j’ai découvert il y a longtemps que tout n’est qu’onde et énergie. Ce que vous appelez fantôme, par exemple, n’est rien d’autre que le résidu énergétique d’une puissante émotion. Et c’est exactement ce qu’il vient de se passer : comme un diamant sur un tourne disque fait jaillir la musique d’un vinyle, je viens d’extraire la chanson de ce lieu sous forme d’images. Plus l’émotion est forte plus l’image sera précise. Dans le cas présent, il suffisait d’une colère sans vrai mobile et d’une peur peu motivée, pas de quoi voir guère plus que des ombres. Je m’aperçois que je ne me suis toujours pas présenté, on m’appelle Diamant. En tout cas, j’ai tout fait pour qu’on ne m’appelle plus que comme ça. C’est un nom peu commun, mais je suis tout sauf ordinaire et surtout je ne tiens pas à ce qu’on connaisse mon vrai nom. Je suis une sorte de détective de l’occulte, je sauve le monde tous les quatre matins, quand je ne meurs pas bêtement écrasé par un camion de glace. Je sais ce que vous pensez, quel homme incroyable qui se sacrifie pour sauver le monde alors qu’il pourrait passer son immortalité à se dorer la pilule à Punta Cana. Mais détrompez-vous, d’une part, on se lasse très vite du sable blanc (en tout cas passé la première centaine d’année) et surtout on ne peut pas fuir son destin. Pour citer un grand philosophe (ou presque) : « A grands pouvoirs, grandes responsabilités » n’y voyez pas une quelconque maxime altruiste, non, la vérité c’est que j’ai plus d’une fois essayée de me foutre totalement du monde qui m’entoure et ça c’est toujours très mal terminé pour moi. Appelez ça « Karma » ou « juste retour des choses », le fait est que plus on vit longtemps, plus on a intérêt à ce que le monde qui nous entoure ne vire pas au cauchemar. Voilà comment, avec aucune autre ambition que de se la couler douce, on se retrouve finalement à vider les poubelles mystiques de l’univers
Bref, j’aurais tout le temps de vous parler de moi par la suite (c’est un loisir que j’affectionne au plus haut point) mais il est temps de faire avancer l’histoire. Je n’avais d’autres pistes que Sonatine et ma première et dernière visite c’était très probablement mal passé. Il me fallait donc réfléchir à un plan d’action, mais surtout il me fallait quitter les lieux avant de finir en garde-à-vue. Devant la porte, je tombais nez à nez sur Line. Elle semblait en forme mais paniquée et surprise. Ses grands yeux bleus inquisiteur me dévisageait tandis qu’elle posait la seule question évidente étant donné la situation : « Vous êtes qui ? ». Je répondis le plus évasivement possible, elle me demanda si j’étais Diamant, ça simplifiait les choses.


Alors qu’elle se réjouissait de me retrouver (j’avais donc tout de même réussi quelque chose dans cette affaire), je l’invitais à me suivre rapidement et à nous éloigner de l’appartement. En chemin, elle m’apprit les derniers éléments que j’ignorais : je l’avais retrouvée et libérée la veille, mais les hommes de Sonatine étaient sur nos traces. Je m’étais donc proposé de les retenir, non sans lui donner rendez-vous aujourd’hui chez Edwin, lui précisant au passage que mon apparence pourrait être très différente. Cela ne semblait pas la choquer, tant mieux, la situation était suffisamment compliquée comme ça. Lorsqu’elle eut terminé sa mise au point, elle sortie de sa poche arrière un courrier qu’elle me tendit avec une moue pincée. Elle avait trouvé la lettre dans la boîte de son frère et elle m’était nominativement destinée. Son contenu était simple, si nous voulions revoir Edwin, je devais remettre à Sonatine le joyau de Kfah.
Je compris soudain mieux ce que j’avais vu plus tôt, Edwin était connu dans le milieu comme étant le propriétaire légitime de cet artefact. Un artefact mineur et pas fondamentalement dangereux que je l’avais convaincu de me confier il y a de ça quelques mois. Sans être véritablement collectionneur, j’aime à rassembler dans ma voûte (une salle au trésor secrète) les artefacts qui pourraient nuire à notre société. J’ai ainsi rassemblé de nombreuses pièces de valeur qui me valent souvent un intérêt dont je me passerais.


Line me supplia de payer la rançon. Elle savait être diablement convaincante avec ses grands yeux tristes et le souvenir fugace de la lingerie entrevue dans son appartement acheva de me convaincre. En soit le joyau n’était pas extrêmement dangereux et j’aurai toujours l’occasion de le récupérer plus tard lorsque j’en saurai plus sur la menace que représente vraiment ce Sonatine. Je devais pourtant me montrer prudent, la situation n’avait déjà que suffisamment dégénéré. J’avais besoin d’une nuit de réflexion au calme, ne souhaitant pas impliquer de nouvelles personnes dans cette histoire, je décidais donc de retourner voir Combo. Line supplia pour rester à mes cotés. Non seulement elle voulait m’aider à sauver son frère, mais en plus elle se sentait plus en sécurité avec moi. Comment ne pas la comprendre ? Il y avait pire comme compagnie, je l’invitais donc à me suivre en me demandant si le lesbianisme l’avait déjà tenté.
Comme à chaque changement de corps, j’eu du mal à me faire introduire auprès de Combo. Son entrepôt était en permanence gardé par une armée de gorille tous plus idiots les uns que les autres, le fait que nous soyons deux femmes n’avait pas aidé. Les noms d’oiseaux et les propositions salaces fleurirent, jusqu'à ce que je sois obligé d’employer des arguments plus percutants. Il fallut un nez et un bras cassé pour attirer l’attention de Combo, ce qui fut heureusement plus rapide que prévu. En me lançant dans la bataille, j’avais négligé un détail : une adolescente chétive ne se bat pas comme un adulte qui s’entretient. Le seul coup de poing que je reçus avait bien faillit m’allonger net, je n’étais resté debout que par la seule force de ma volonté et avec la conviction que le prochain coup serait le dernier. Combo se demanda un instant ce qu’il allait bien pouvoir faire de ces deux greluches qui osaient s’en prendre à ces hommes, je lui fis signe de regarder mon aura et il éclata de rire.


Ce soir-là, nous passâmes la nuit dans son entrepôt. Ce n’était pas particulièrement confortable, mais l’endroit était une véritable forteresse, nous pouvions dormir tranquille.Avant de nous laisser tranquille, Combo me reprocha d’avoir agressé ses hommes plutôt qu’employé ma magie. La balance du pouvoir était fragile dans son milieu, tout reposait sur une vision particulière du respect. Le gang de Combo tenait son pouvoir du respect que les gens avaient pour eux et ce respect tenait à la peur qu’ils leurs inspiraient. En se faisant ridiculiser par des filles, ils perdaient en crédibilité. Combo le savait et ses hommes estimaient que s’il ne réagissait pas, c’est qu’il était devenu faible. Je n’avais pas réfléchi à tout ça, je souhaitais surtout préserver mes forces la magie me fatiguant toujours beaucoup. Et puis, il est vrai que j’ai peu d’affection pour le milieu de Combo, je ne tolère son activité que parce que je sais qu’il vaut mieux que ça. Notre discussion me laissa un goût amer, je sentis que mon nouveau changement de corps allait compliquer nos relations et pas uniquement à cause de cette histoire. Combo ne me considérait plus comme un homme, autant dire qu’il ne me considérait plus tout court.
Cette nuit-là, Line insista pour dormir avec moi. Elle n’était pas rassurée et s’inquiétait pour son frère. Elle me pressa de question sur le joyau et sur mon plan, mes réponses semblèrent l’apaiser. Sa poitrine comprimait mon bras droit et je m’aperçus bientôt qu’elle n’était pas totalement insensible à mes charmes. Bien que la situation ne s’y prêtât pas vraiment, je ne résistais pas longtemps à la tentation d’étrenner mon nouveau corps. Line se montra une amante timide dans un premier temps mais volcanique lorsque le désir commença à la submerger. Je m’endormis repu, dans ses bras, blottit contre sa peau nue.
Je la réveillais quelques heures plus tard, au cœur de la nuit. C’était le point d’orgue de mon plan. La planque de Combo possède un accès aux égouts, je fis revêtir de nouveaux vêtements plus discrets à Line et nous nous enfonçâmes dans les entrailles de la capitale. Si Sonatine ne voulait que le joyau de Kfah peu m’importait, mais je ne voulais pas que celui-ci lui serve d’excuse pour me suivre jusqu'à la voûte et s’emparer de tous mes trésors. Ses précautions élémentaires m’assuraient que cela n’arrive pas.


Après une heure de marche, nous rejoignîmes finalement l’immeuble où je cachais mes secrets. J’entraînais Line dans les sous bassement, elle s’étonna lorsque je lui dis que nous étions arrivé. Elle faisait face à une porte en bois qui tenait plus de la planche pourrie, fermée d’un cadenas rouillé. Je posais ma main sur le verrou, il s’ouvrit. « Serrure astrale » lui dis-je devant son étonnement. Seule ma signature énergétique peut la déverrouiller, l’équivalent mystique de la reconnaissance faciale. La porte s’ouvrit révélant ma caverne d’Ali baba. Un bric à brac innommable d’objets plus dangereux et rare les uns que les autres. Line écarquilla les yeux, elle ne savait plus où donner de la tête. Dans le reflet du miroir de l’âme, je l’observais courir dans les allées, s’émerveillant devant chaque rayonnage. Pour ma part, j’étais désormais d’humeur plus sombre, il était temps d’en finir et je lui demandais de saisir le coffre où se trouvait le joyau. Elle s’en empara sans hésiter, inconsciente que quelque chose avait changé. Elle déchanta vite. Je vis dans son expression qu’elle avait compris qu’elle était démasquée.
- Ce que tu viens de saisir est le coffre de soumission, lui dis-je. Il doit être saisi volontairement, mais l’on ne peut le relâcher tant que l’on n’a pas accepté d’obéir à un ordre du maître du coffre. Il faut, bien entendu, accepter sincèrement d’obéir où voir son âme dévoré par le coffre.
- Comment as-tu deviné, me demanda-t-elle.
- J’avais des doutes depuis le début mais tu as habilement étouffé mes soupçons dans la nuit. La vérité ne m’est apparue qu’a l’instant, lorsque dans ta course tu es passé devant cette glace en forme d’œil. Elle a pour particularité de révéler la vraie apparence de celui qui s’y reflète.
Comme je le redoutais, l’enlèvement d’Edwin n’était qu’un prétexte pour découvrir l’emplacement de la voûte. Mais mon adversaire avait été plus malin que moi, pourquoi me faire suivre s’il pouvait être à mes cotés. Line reprit sa véritable apparence, elle se révéla être un bel homme brun à la peau buriné et au regard gris acier.
- Sonatine, je présume ?
Il me fit un petit sourire pincé.
- Je ne désire pas la guerre, mon ordre sera donc simple, libères mon ami et sa sœur et nous serons quitte.
- On pourait travailler ensemble, ça e passe bien entre nous.
- Allons, tu veux vraiment jouer cette carte ?
Sonatine me tança d’un air sombre, j’eu le plus grand mal à cacher mon trouble tant il y avait quelque chose de dangereux et d’excitant chez lui.
Il accepta finalement mon offre, songeant probablement que connaître l’emplacement de la voûte méritait déjà en soi de nombreux sacrifices. Le coffre relâcha son emprise dans une voluptueuse bouffé de plaisir. Je goûtais l’ironie de la situation, lui qui vivait de la drogue aurait bien du mal à oublier le contact du coffre. Quelques heures plus tard, je récupérais Line et Edwin. Si mon ami n’avait à déplorer que quelques contusions, Line semblait avoir enduré plus de sévices, à commencer par une consommation forcé de Bug. Mon ami me remercia pour mon aide, il devrait veiller sur Line le temps qu’elle se remette, mais il était rassuré de la trouver toujours vivante.
Le soir même, Sonatine se rendit à la voûte avec ses hommes. Même si je n’en fus pas témoin, j’imagine sans mal sa tête lorsqu’il réussit à forcer la porte pour pénétrer dans une banale cave à vins. Nul doute qu’il a également dû me maudire lorsque la police l’a cueilli au sortir de l’immeuble pour effraction. Je m’étais bien gardé de le prévenir que la première protection que j’avais posé sur la voûte était un moyen d’en déplacer l’entrée.
Tout c’était bien fini, je décidais donc de profiter un peu de la vie avec ce nouveau corps. J’essayais de ne pas y penser, mais je sentais très bien que cette enquête n’était qu’un avant-goût d’un ensemble de problème dont je n’avais même pas conscience.